Kenshîro frissonna lorsque la brise hivernale toucha sa peau, la parcourant d'une violente chair de poule. Le jeune homme se frictionna les bras en jurant, grelottant un instant, tétanisé par le froid, avant de parvenir à enfiler la chemise, puis le sweet propre que Duncan lui tendait. Face à eux, Côtelette était assis, silencieux, ignorant le tas de fripes ensanglantées qui gisait à ses côtés. Le Gruikui n'avait pas terminé de faire sa mauvaise tête.
"Dépêche-toi de faire brûler tout ça, maudit gigot !" l'invectiva le borgne avec humeur.
Ces vêtements étaient fichus. Les fibres s'étaient imprégnées du sang d'Haneko qui s'était rapidement mis à sécher, alors que le vent glacé les enveloppait. Il n'avait pas d'autre choix que de se débarrasser de tout ça pour pouvoir continuer sa route sans heurts, même si cela lui brisait le cœur. Il appréciait beaucoup cet ensemble de voyage... Mais il ne pouvait décemment pas débarquer à Wilma dans ces frusques souillées. Duncan lança un regard réprobateur au petit cochon. Laissant son dresseur finir de s'habiller, le rongeur vint faire face à Côtelette. Le Gruikui plongea son regard méchant et calculateur dans celui, comminatoire du Pikachu. Leur échange silencieux ne dura que quelques secondes. À contrecœur, le pokémon Feu obtempéra. Ses naseaux crachèrent quelques étincelles en grognant, avant qu'une véritable flamme vienne enfin embraser le tas de tissus. Kenshîro avait remis son sac sur son dos, observant à présent le petit brasier qui consumait les fripes encerclées de gros cailloux blancs et emmêlées de petites bûches et de brindilles. Lorsque les flammes s'éteindraient, cela ressemblerait simplement à un feu de camp comme il y avait tant. Ils avaient eu la chance de se trouver non loin d'un petit abri de dresseurs, comme il en existait plusieurs dizaines à travers la région. Ces simples toits suspendus, sans murs la plupart du temps, servaient aux dresseurs itinérants à se protéger de la pluie, et possédaient tous un coin aménagé pour y faire un feu sans mettre en danger la végétation alentours. À présent, ils pouvaient partir sans crainte. Jetant un dernier regard aux faible brasier, Kenshîro fit signe à ses compagnons de le suivre, et se remit en route. Wilma n'était plus qu'à deux heures de marche, et malgré tous leurs efforts, ils n'arriveraient pas avant la nuit.