Tout est si sombre... Tout est si silencieux... J'ignore depuis combien de temps j'erre dans ces ténèbres. Quelques minutes ? Plusieurs jours ? Des années ? Je n'en sais rien. tout est froid, calme, noir, immobile, vide. Je n'ai aucune sensation, pas le moindre sentiments et je n'aborde pas le sujet des émotions. Je suis là, et le temps passe. Même si pour la première depuis je ne sais combien de temps, je commence à m'ennuyer.
*Boum boum*Tiens ? quelqu'un joue du tambour ?
*Boum boum*C'est amusant comme rythme. Deux coups en une seconde avec un décalage d'une seconde et demie entre chaque paire de coups. Ca me rappelle quelque chose. Je ne sais pas du tout ce que c'est...
*Boum boum*Je m'appelle Samaël. Tiens, c'est bizarre, je n'avais jamais éprouvé le besoin de retenir ce détail. Il vient de me revenir. Ce battement de tambour doit être magique. Une minute... J'ai dit...
battement ?
*Boum boum**Boum boum**Boum boum*Je crois que je sais ce que c'est... Je crois que j'entends les battements de mon coeur... Mais cet endroit était tellement silencieux... Comment se fait-il que...
*Boum boum*J'ai la migraine. Tiens, c'est nouveau aussi, ça... Mais où est-ce que je suis ? De plus en plus d'informations me reviennent... Et ça ? C'est quoi ?
- ...réveil... an.. ées... ranger...- ...ssible... mort... eugle...Ca, je connais aussi... Ce sont... des... ce sont des... v... Voix... Des voix humaines. Mais qu'est-ce que je fais ici ? Argh... Et ce martèlement dans ma tête...
*Boum boum**Boum boum**Boum boum*TAIS-TOI ! LAISSE-MOI...
*Boum boum*... AU CALME... ARGH !!!
*Boum boum**Boum boum*... Je... Je ne veux pas... J'ai...
...
*Boum*...
...
...
...
...
Je m'appelle Samaël Marshall, et je suis dans le coma depuis deux ans.
***
- Mademoiselle Marshall ? Vous m'entendez ?
Je cligne des yeux. Cette camisole dans laquelle ils m'ont enfermée me démange. J'ai envie de me gratter la joue, mais mes mains sont immobilisées. Je regarde l'homme assis en face de moi. Il m'énerve, à me prendre de haut. Mes pieds sont enchainés, et fort heureusement, sinon cet homme se serait pris un coup de pied retournée en pleine face. Une entaille sur son visage attire mon regard. Ah oui, exact, je l'ai déjà fait, c'est pour ça que je suis enchainée. J'inspire, et me rappelle ma promesse. Je ne devais pas m'énerver pour espérer sortir d'ici le plus vite possible.
- Je vous reçois...
Docteur- Bien. Alors, est-ce qu'aujourd'hui, nous allons avancer ? J'aimerai que vous me racontiez ce qu'il vous est arrivé. Depuis le début.
- Humpf... Même pas en rêve.
Oui je suis effrontée, mais je n'aime pas ce docteur qui me pose dans arrêt des questions.
- Alors nous allons essayer autre chose.
Je n'aime pas vraiment la façon dont il tient la pokéball qu'il me montre... Je... Je... Je n'ai pas envie de rester ici... Je ne veux pas... raconter...
***
Je m'appelle Samaël Marshall. Je suis la fille de Malphas et Lilith Marshall, deux dresseurs tristement célèbres pour être les plus mauvais du métier. Leur hôtel d'entrainement est une ruine et le nombre de plaintes pour pokémon traumatisés ne cesse d'augmenter.
Enfin bref. Par quoi commencer ? Mon souvenir le plus lointain peut-être. Je me souviens de ma première rencontre avec un pokémon sauvage. C'était un Boustiflor. Je m'étais aventurée hors de Doublonville, seule. Je devais avoir 4 ou 5 ans. J'avais échappé à la surveillance de la nounou et j'avais suivi un Papillusion jusque la campagne sud de la ville. C'est là qu'un Boustiflor s'est jeté sur moi, sans doute pour me capturer et nourrir sa progéniture. Je sais que je n'aurais pas du échapper à la vigilance de ma nounou, mais vous savez comment on est à cet âge-là. Toujours est-il que j'ai failli servir de casse-croûte à des plantes. Drôle de perspective, et j'en ai encore des frissons. Je n'aurais pas été là pour en parler si cet homme n'était pas intervenu.
Un froid intense m'a parcouru l'échine et l'instant d'après, mon agresseur était dans un cocon de glace. Un homme, très grand, barbu, au regard dur, m'attrapa le poignet et me remit sur pieds (j'étais tombée). Je me souviendrai toujours du regard assassin qu'il m'avait lancé, et la plainte réprobatrice de son Givrali à mon égard.
- Tes parents ne t'ont jamais appris à ne pas sortir toute seule dans la nature ? avait-il lâché d'une voix rauque. Il sentait la liqueur.
- Non... répondis-je d'une petite voix craintive.
- Et bien maintenant tu le sais. Eloignons-nous : ce cocon de glace ne durera pas, avec cette chaleur. Je t'ai juste donné du répit.
Il m'attrapa le bras d'une manière si brusque que j'en eu les larmes aux yeux. E ce moment-là, je n'étais pas sûre de l'apprécier. Il était trop brutal. Il m'emmena à l'orée de la ville, et me toisa du regard.
- Comment tu t'appelles ?
- Samaël Marshall.
- Marshall ? Comme les deux dresseurs de l'hôtel ?
- Oui monsieur. Ce sont mes parents.
- Pas étonnant qu'ils ne t'enseignent pas les banalités de la vie s'ils ne sont pas capables de dresser des pokémon convenablement. Pauvre petite.
Le ton sur lequel il avait sortit les deux derniers mots me prit au dépourvu. Il avait été dur et cassant tout le long et voilà qu'il devenait compatissant. Bien que j'ignorais pourquoi : à ce moment-là, je ne connaissais pas la réputation de mes parents et je n'avais pas fait le rapport entre dresser des pokémon et élever un enfant.
- Penses-tu pouvoir me rejoindre ce soir, ici-même ? Je ne peux pas te laisser comme ça... Tu dois apprendre à te débrouiller.
- Je peux essayer. Mais pourquoi ?
Il ne répondit jamais à ma question. Il se releva avec un sourire et alla à grands pas vers Doublonville.
Le soir même, je m'en souviens encore. Quand je suis arrivée, après avoir passé une journée des plus banales (je n'avais pas parlé de ma mésaventure à mes parents), je me suis éclipsée sans difficultés et j'ai rejoins le lieu où l'individu m'avait donné rendez-vous. Il n'y avait personne et j'attendis un moment en frissonnant. Soudain, un grognement sourd me fit sursauter. Je voyais dans le noir deux yeux brillants et soudain, une flamme passa près de mes cheveux. Je poussais un cri en voyant surgir quelque chose de petite taille mais qui ressemblait à un Pokémon. En se dirigeant vers moi, je le voyais s'approcher avec une lueur dans le regard et une petite flamme qui s'échappait de sa gueule entre ses crocs. En reculant contre le mur, ma main se referma sur un objet de petite taille, et de forme sphérique. J'avais déjà vu mes parents et beaucoup d'autres gens se servir de ces choses, et c'est machinalement que je l'envoyais vers mon agresseur.
Elle s'ouvrit avec un déclic sonore tandis que le Pokémon, aussi incroyable que cela puisse paraître, s'était assis en la voyant arriver. Il fut aspiré dedans dans un léger flash lumineux, et tout redevint calme. Une petite voix résonna alors dans ma tête. Enfin ce n'était pas vraiment une voix, mais c'était des flashs d'images. En les visualisant, je compris que j'étais désormais propriétaire d'un Caninos, et que je ne devais surtout pas écouter mes parents pour l'élever. Mais mon coeur.
Une fois rentrée chez moi, je me suis calée dans le lit avec lui. Je lui gratouillais le crâne en me perdant dans son regard pétillant. J'avais mon premier pokémon. Bien que je ne savais pas exactement ce que ça impliquait, ni comment j'avais fait... Ce que mes parents ont tenté de savoir le lendemain, mais chose curieuse, lorsque je tentais de leur raconter ma rencontre de la veille avec le barbu, aucun son ne pouvait sortir de ma bouche. Comme s'il m'était interdit d'en parler...
Toujours est-il que j'ai suivi le conseil de la mystérieuse présence qui m'avait expliqué les rudiments du dressage. Etait-ce à cause d'elle que je ne pouvais pas mentionner le barbu ? Y était-il lié ? Evidemment, mais je ne l'avais appris que bien des années plus tard. C'est un autre événement très important, je ne voudrais pas gâcher la surprise de ce récit.
Le temps avait passé, et loin de me lancer si tôt dans une chasse au pokémon, j'ai pris le temps de m'occuper de Pétard. Je trouvais que ce surnom lui allait comme un gant, rapport à son regard pétillant et au fait que ses attaques étaient explosives mais brèves. C'était devenu un roi de l'attaque rapide et efficace, mais il manquait cruellement de précision. Je passais beaucoup de temps dans la bibliothèque pour apprendre tout ce que je pouvais en consultant les archives des Pokédex remplis par les dresseurs avant moi. C'est ainsi que j'appris que Caninos évoluait en Arcanin sous différentes conditions, la plus commune étant l'exposition aux radiation d'une pierre Feu et l'assimilation de celles-ci par l'organisme du chiot. En évoluant, il pouvait maitriser une attaque vraiment particulière, Vit. Extrême ! Cette attaque était, selon les explications que j'en lisais, une véritable aubaine pour augmenter sa force de frappe à grande vitesse. Au fond de moi-même, même si j'étais attachée à la forme de Caninos, j'avais hâte qu'il évolue, et sans avoir recours à une pierre.
Le temps passait et j'étais de plus en plus proche de mon Pokémon. Plus que de mes parents, dont je me rendais de plus en plus compte de leur incompétence. Je m'étais liée à un autre pokémon, un Ptitard. Le pauvre s'était fait capturer par un Tarpaud qui allait sans doute le dévorer (j'avais appris dans les archives que les Tarpaud se nourissaient de pokémon insecte et de Ptitards de clans ennemis...). Pétard l'avait mis en fuite en essayant de le dévorer, en vain. Mais on avait sauvé le Ptitard qui avait refusé de partir. J'avais donc du piquer une pokéball à ma mère pour l'enfermer dedans et empêcher quiconque de le capturer par inadvertance. Mais il refusait de rentrer dedans par la suite, et Pétard ne tarda pas à l'imiter.
Lorsque j'avais 12 ans, je suis partie à l'aventure. En pleine nuit, car mes parents avaient émis l'idée qu'ils m'enfermeraient si je faisait montre de partir. Du coup, j'ai fugué en leur laissant un petit mot, accompagnée de Rocket, la Tétarte (elle n'avait pas mis longtemps à évoluer) et Pétard, toujours sous forme de Caninos. J'ai pris la route, destination Oliville pour quitter Johto. Je voulais voir du neuf, et je m'intéressais à Sinnoh. Beaucoup de légendes, un climat très particulier... Je ne pouvais pas ne pas y aller.
***
Sinnoh était vraiment une région magnifique. J'y ai passé presque quatre ans à m'y entrainer, et à apprendre plein de choses, notamment l'art de l'escrime. Je me suis intéressée au maniement du sabre et j'ai donc commencé un entrainement pour manier une épée. J'ai même tenté le défi des arènes, mais je n'ai pas réussi à obtenir le 5e badge. La championne d'Unionpolis était beaucoup trop puissante pour moi. Pour une fille de 16 ans, repartir de Sinnoh avec 5 badges, c'était déjà assez satisfaisant comme ça. Même si j'aurais aimé tenter le défi de la ligue, mon équipe n'était pas assez performante pour cela. C'est ainsi que je décidait de changer d'horizons, encore une fois, et de partir pour Hoenn.
Je me dois de préciser avant de continuer que mes parents ont tenté de me retrouver. Ils y sont parvenus au bout d'un an et nous avons misé ma liberté sur un match. Effectivement, leur mauvaise réputation n'était pas usurpée. Je les ai battus sans trop de problèmes. Comment peut-on dresser aussi mal des pokémon ? J'ai donc gagné ma liberté de bouger de cette manière.
A Hoenn, j'ai fait une rencontre intéressante. J'y suis restée deux ans, et je suis partie après cette rencontre. Je n'ai pas tenté le défi des arènes, mais me suis intéressée aux concours. Ceux d'Hoenn étant réputés, je trouvais que c'était une bonne manière de m'intéresser au bien-être et à la présentation de mes partenaires. En arrivant sur le sol au climat tropical (il faut reconnaitre qu'il fait plus chaud à Hoenn qu'à Sinnoh...), mon équipe était composée d'un Arcanin (Pétard, qui avait fini par évoluer), d'une Tartard (idem), d'un Luxio, et d'un Prinplouf. Une équipe plutôt homogène, qui résultait de différentes tentatives d'équipe. J'ai continué à apprendre beaucoup de choses, et j'ai surtout beaucoup trainé autour du volcan. J'ai notamment récupéré un Draby un peu casse-cou qui ne cessait de sautiller. Le jour où il a finalement évolué en Drattak a été une libération pour lui. Et pour moi, qui commençait à avoir du mal à le supporter.
Voilà pour le résumé. Passons aux choses sérieuses.
Tout a commencé le 1er juillet 2019. J'étais à Crimetronellle, décidée à relever le défi des arènes de la région. Mon équipe avait gagné en puissance et je voulais la mettre à l'épreuve, ainsi que ma capacité à dresser des Pokémon. Quelques jours avant la date du défi, la ville fut en proie à une agitation soudaine : deux Maganons attaquaient la ville et provoquaient un gigantesque incendie ravageur, surtout quand on se rappelle que la ville était construite dans les arbres. J'ai donc essayé d'aller les éliminer mais quelque chose de très lourd se mit en travers de ma route. Avant que l'impact ne se fasse, j'ai aperçu un reflet métallique familier, et lorsque l'élément fracassa la sol, j'avais bondi en arrière et j'avais dégainé mon sabre.
Une paire d'yeux. Ce qui venait de frapper le sol était pourvu d'une paire d'yeux. Pourtant j'étais certaine d'avoir reconnu le scintillement d'une lame. La poussière retomba, et un ricanement désagréable se fit entendre lorsque la silhouette d'un homme armé d'une épée se dessina. Il était filiforme, les cheveux blancs et le regard dément. Et effectivement, il portait une épée et un bouclier. L'épée était effectivement pourvue d'une paire d'yeux. C'était un Pokémon, à n'en pas douter.
Toujours en ricanant, il leva son arme vers moi et se jeta à corps perdu vers moi. Je n'ai eu le temps que de voir l'éclat maléfique dans ses yeux avant de lever mon sabre et de parer son coup. La puissance de celui-ci me stupéfia. Je cru que mes genoux ne tiendraient pas. Il leva son arme et je fis un pas sur le côté pour lui assener un coup à mon tour. Il le para sans problème. Sa vivacité, pour le maniement d'une épée aussi gigantesque, était surnaturelle. Quel était ce pokémon ? D'un mouvement, je fis sortir mes quatre compagnons principaux (Arcanin, Tartard, Drattak et Luxray) pour qu'ils maitrisent les deux pyromanes et l'incendie, pendant que je m'occuperai de mon adversaire.
Ils partirent en direction des ennuis, tandis que je continuais à rester sur la défensive face à un adversaire très puissant. Nul doute que ses coups auraient fini par avoir raison de mon endurance, mais un bruissement d'aile vint à mon secours. Un Altaria s'occupa de distraire mon adversaire, le temps que je lève mon arme. Lorsque je l'abattis vers lui, il ne broncha pas, et trancha le pokémon en deux avant de parer du bouclier mon attaque. Un torrent de sang écarlate l'aspergea, et il se lécha les babines. Mais qui était ce fou ? Il venait de tuer un pokémon sans aucun remord et semblait même y prendre un plaisir malsain ! La peur commençait à me tirailler mais je devais l'affronter. Bien que je n'étais capable que d'essuyer ses coups sans pouvoir riposter. Chacun de mes coups était sans effet sur lui, il les esquivait trop facilement.
Il m'adressa un regard diabolique et frappa le sol devant moi. Aveuglée, je ne put que reculée, et je le vis surgir du mur de poussière qu'il avait levé. Une voix froide s'éleva de son corps, sans que les lèvres de l'individu ne bougent.
- Nourris-moi !
Un frisson de terreur m'étreignit et je voulu fuir. Mes pieds se prirent dans une branche et je basculais en arrière. La lame du pokémon-épée se rapprocha de ma gorge au moment où je me renversais. Je crus que ça allait être la fin, mais une ombre passa devant moi et la seconde suivante, un liquide tiède ruissela sur moi. Je heurtais violemment le sol et le corps tranché d'Arcanin retomba sur moi. Il m'adressa un dernier regard, plein d'espoir, et le pétillement qui habitait ses yeux habituellement s'éteignit. Mon adversaire explosa de rire mais tout s'estompa autour de moi. Son rire, le bruit de la point de son arme qui tapait au sol, les flammes, les habitants, terrifiés... Tout devint silencieux. Tout ce que je voyais, c'était le corps de mon premier ami, mon premier Pokémon, reposer devant moi, une énorme plaie ruisselante parcourant son pelage d'ordinaire si chaud.
Ca aurait pu être moi. Ca aurait dû être moi. Je ne sais pas comment je me suis relevée, mais je le regardait avec mépris. Cet homme qui avait attenté à ma vie, et qui avait forcé mon partenaire à se sacrifier pour que je continue de vivre. Cette fois-ci, plus de quartier. Plus de défense. Attaquer, encore, et encore. Sans faire attention à l'entaille qui venait de se faire sur mon ventre. Ni sur celle de ma cuisse. Ni la douleur suite au coup de bouclier que je venais de prendre en pleine tête. Juste attaquer. Et être attentive. Pour voir ce moment où la garde de mon ennemi devint complètement invisible et perméable à mon attaque. D'un vif mouvement, je levais le bras pour plonger dans cette faille. Et mon sabre frappa. Pas aussi profondément que je l'espérais, mais je lui tranchais le côté droit du visage, divisant en deux son oeil. Il poussa un horrible hurlement, et j'entendis alors la voix froide retentir de nouveau.
- Mon pantin... Je vais te... Noctunoir, Spiritomb, détruisez-la...
La seconde suivante, mes membres se firent lourds. Mon environnement se tordit, et je ne pouvais rien faire d'autre que de tomber sur le sol, et de fermer les yeux. Tout n'était alors plus que ténèbres.
***
Lorsque j'ai ouvert les yeux, j'étais engourdie. Tout était blanc, contrairement à mon état, où tout n'était que ténèbres. Je voyais des gens penchés sur moi, et s'affairer. Je voulais leur sourire et leur dire que tout allait bien, mais aucun son ne sortit de ma bouche. Epuisée par ces faibles événements, je refermais les yeux.
***
- Pour résumer la situation, mademoiselle Marshall, vous vous êtes donc réveillée dans cette clinique après ces tragiques événements, au bout de deux ans. C'est cela ?
Qu'est-ce que ça peut te faire ?
- Oui. Par la suite, j'ai appris que mon Luxray avait été carbonisé par les Maganons, que Drattak avait eu les ailes tranchées par le psychopathe et qu'il s'était laissé mourir de désespoir, après toutes ces pertes. Et on n'a jamais revu la Tartard.
- On vous a transférée ici, et cela fait six mois que l'on s'occupe de la rééducation de vos membres après le coma. Vous avez montré une excellente réaction aux stimuli que nous envoyions à l'ensemble de votre corps, ce qui fait que vous avez pu reprendre une vie normale au bout de quatre mois, mais vous allez surement avoir besoin de temps avant de pouvoir être aussi agile que vous l'étiez au sabre. Et ne forcez pas sur vos jambes. Vous n'êtes pas fonctionnelle à 100%.
C'est bizarre. Je le sens plus détendu. Et mon esprit se libère, je suis de nouveau libre de mes mouvements.
- Qu'est-ce que vous m'avez fait ?
- Votre mémoire était défaillante, et vous refusiez de vous remémorer tout cela. Par l'hypnose, je vous ai fait replonger dans votre passé pour que vous retrouviez le contact avec la réalité. Dans vos délires, vous affirmiez que votre Arcanin était avec vous. Hors, sa dépouille a été rapportée à vos parents... D'ailleurs... Maintenant que vous êtes de retour, il faut que vous sachiez que le psychopathe a... été rendre visite à vos parents il y a deux mois... Il voulait vous retrouver...
- Il n'a pas...
- Si... On a retrouvé des morceaux de vos parents dans un rayon de presque 3km autour de votre maison...
Ma tête tournait. Je me sentais vidée, comme si j'avais perdu quelque chose. Par la suite, le médecin m'expliquait que j'étais victime d'une malédiction puissante. Mon esprit avait combattu pendant deux années entières cette malédiction et j'avais fini par ouvrir les yeux, mais je délirais complètement. A force de discussions et de séances d'hypnoses, j'avais réussi à repousser le démon qui me tourmentait dans les confins de ma conscience, et pour l'exorciser, il fallait que j'admette la réalité. Lors de la dernière séance, j'avais poussé des hurlements terribles au moment de raconter ce qui était arrivé après l'arrivée du psychopathe, et je n'avais pas pu aller plus loin dans le récit. Le docteur savait que mon comportement était manipulé par le spectre qui me hantait et que le fait de pouvoir terminer le récit le dégagerait définitivement. Il comptait me garder en observation pendant plusieurs jours pour s'en assurer. Epuisée, je me laissais aller au sommeil sur la table.
***
Voilà plus d'un mois qu'il m'a annoncé que j'étais tirée d'affaire. Pourtant ils ne veulent pas me laisser sortir. Je dois absolument retrouver ce taré et le faire payer pour ce qu'il m'a fait, à mes pokémon et à ma famille... Comment on peut être aussi tordu ? Humpf... Surtout utiliser un pokémon pour faire ça... Je croyais que le sabre était un hobby, un spectacle, mais cet homme utilise l'art de l'escrime pour tuer... Je n'avais jamais entendu parler d'une telle chose. Je rumine tout ça dans mon lit, lorsque j'entends des pas dans le couloir. Je fais semblant de dormir. Ils m'ont fait une piqûre censée me faire dormir pendant 12h dans l'après-midi, mais j'ai remarqué que j'avais commencé à développer une résistance à cette drogue. Je fais donc semblant d'être alterée par cette substance (issue d'un Florizarre, disaient-ils).
- ... garder encore longtemps ?
- Le rapport précise qu'elle est instable. On continue de la droguer et de lui faire croire qu'on va la sortir de là. Le docteur lui fait croire que ça fait moins d'un mois qu'elle a retrouvé la raison, mais il a besoin d'elle pour ses expériences.
- Un mois ? Il arrive à altérer sa perception du temps de cette manière ?
- Oui... Je ne sais pas les dates exactes de son examen médical, mais je sais que ça va faire un an bientôt qu'elle est dans cet état végétatif. Apparemment, elle nourrit un désir de vengeance qui intéresse le Doc... Et j'avoue que... Hey, qu'est-ce ???
Un coup sourd, et le voilà hors jeu. Je n'en pouvais plus. Je ne suis qu'un cobaye de laboratoire ? Pas question ! Je dois partir de là. L'assistant médical s'est évanoui. Je récupère la seringue avec laquelle ils me piquent régulièrement, et je leur assène une bonne dose dans la nuque. Un an que je suis ici ? Ils se sont bien foutus de ma gueule... Je dois sortir de là... Mais comment faire ? Je...
Tout est de nouveau noir, et j'ai mal à la nuque. Quoi encore ?
***
J'ouvre brutalement les yeux, et la première chose que je fais, c'est de me débattre. Je donne un coup dans... une barbe ? Je me calme et regarde la personne qui me tamponnait la tête. Un regard dur, une barbe blanche... Je connais ce visage. Je cligne des yeux et tente de discerner le visage de mon médecin improvisé. Le barbu de mon enfance ! Il n'a pas changé d'un poil. Quelques rides, toutefois...
- Salut, Samaël. Tu as bien grandi, dis-moi...
- Vous ? Qu'est-ce que vous... ?
- Chaque choses en son temps. Prends de la soupe. Elle est chaude et va te faire du bien. Repose-toi, tu dois éliminer ces drogues qu'ils t'ont injecté.
Je prends le bol qu'il me tends et bois la soupe chaude. Quel délice ! Je le regarde avec insistance et il finit par céder, en souriant.
- Ca faisait quelques temps que j'étais à ta recherche. J'ai appris ce qu'il t'étais arrivé, et ça m'a glacé d'effroi. Ce pauvre pokémon... Tranché comme une vulgaire feuille... Dire que je l'avais capturé pour toi...
- Quoi ? C'est moi qui l'ai capturé ! Quand vous n'étiez pas venu ce soir-là !
- Et non. Je suis désolé de te dire ça, mais je l'avais capturé la veille. Je me suis dis que tu ferais une bonne maitresse pour lui, et j'avais raison. Seule une excellente dresseuse pouvait être protégée de cette manière par un pokémon. Tout ce qu'il s'est passé ce soir là était une mise en scène. La capture, et les révélations à tes parents. Tout était de moi, et de mon fidèle Xatu. On t'a expliqué les bases du dressage et on t'a empêchée de parler de nous...
- C'est... c'est...
Les mots me manquent pour l'insulter.
- Tu t'en es très bien sortit par la suite, Samaël... Je suis fier d'avoir cru en toi. Mais cet homme... Je n'ai jamais vu une telle noirceur dans le coeur d'un humain...
- Il a parlé de pantin, quand je lui ai tranché l'oeil.
- Oui, je suppose qu'il est possédé par un pokémon très puissant... L'Exagide qu'il manipule, peut-être ?
- C'était donc bien un pokémon ?
- Oui. Une épée hantée, très puissante, mais très dangereuse. Il semble que celle-ci soit particulièrement belliqueuse... Il te traque, tu sais...
- Oui, j'ai appris...
- Tu vas devoir très vite retrouver tes aptitudes à l'épée. Et te recomposer une nouvelle équipe capable de rivaliser avec la sienne. Mais il te faut disparaitre en attendant. Et j'ai la bonne destination pour toi. Il parait que notre ami est originaire d'Alcea. Tu pourrais aller enquêter sur lui là-bas, non ?
- C'est où ?
- Loin... Mais il te faudra être discrète lorsque tu enquêteras. Tu vas devoir disparaitre chaque fois que tu poseras des questions... Je sais c'est complexe mais... Qu'est-ce qu'il y a ?
Je souris. J'ai mon idée. Je sais comment reprendre tout depuis le départ et enquêter, sans jamais mélanger ces deux objectifs. Je vais devoir me créer une nouvelle identité pour mes phases d'enquête.
***
Tout reprendre de zéro... Ca va être dur. Mais je vais profiter de mon expérience pour aller de l'avant. Je m'appelle Samaël Marshall, je suis une dresseuse originaire de Doublonville. Et à l'âge de 20 ans, je reprends tout de zéro en descendant du bateau, suivi par une Salamèche qui ne semble pas vraiment savoir ce qu'elle doit faire... Le chemin va être long. Je pose un pied sur le quai.