Une aventure ?

« Mieux vaut vivre enchaîné près de celui que l'on aime, que libre au milieu des jardins près de celui que l'on hait. »

Un vrai bordel. Je me trouvais devant la maison de Kyle, attendant patiemment que celui ne sorte pour lui faire la surprise de ma présence au matin de son départ. J’allais lui souhaiter bon courage, et retourner dans mes livres à faire quelques recherches sur des choses qu’il m’arrivait parfois moi-même de ne pas comprendre. Eos, mon Nucleos un peu grognon à cause de l’heure à laquelle je l’avais obligé à se réveiller, s’était posé comme un soufflet qu’on sort trop tôt du four sur ma tête. Il regardait les gens passer avec un air morose, ne s’intéressant pas particulièrement aux maigres flux de voyageurs qui allaient explorer les champs. Alors que je venais de sortir un livre nommé « La Mort des cellules. », un petit ouvrage d’un auteur peu connu qui était censé démocratiser la science, une idée à la fois absurde et amusante, j'entendis... quelque chose.

Quand le bruit commença à s’intensifier, je posai directement mon livre par terre, inquiet, et ouvris la porte en volée, me dirigeant vers la cuisine d’où provenait le vacarme. Et c’est là que je le vis une scène de plus amusantes et des plus choquantes. Phanpy léchouillait un Kyle à moitié nu, une simple serviette lui cachait les parties génitales. De mémoire, nous avions toujours été pudiques l’un envers l’autre, ce qui me poussait à croire que cette situation était des plus déconcertantes. Je souris d’un air béat avant de détourner le regard et enfin de me retourner totalement.

« - D… Désolé, lançai-je en bégayant, le visage rouge, l’image de ce corps à la fois fin et bien bâti commençant à s’immiscer dans ma mémoire. »

Je cessai presque de respirer avant que Nucleos n’arrive, me faisant remarquer que le mouvement brutal qui m’avait permis d’arriver dans la maison l’avait fait tomber. Et ce n’est pas sur moi qu’il allait abattre sa menue colère. A peine me retournai-je qu’il envoya une faible attaque psy pour défaire la serviette de bain et la plonger par terre, laissant Kyle cette fois-ci nu comme un verre, chose que je n’observai pas grâce à la table qui nous séparait et ma capacité à fermer les yeux au bon moment.

« - Je n’ai rien vu ! Hurlai-je alors, mon corps raidi, quelques gouttes de sueurs sur mon visage. »

Une main en arrière, habile, me permit de saisir Nucleos et je me mis à courir à l’extérieur. Décidément, cette matinée commençait fort. Attendant un instant, je pris le livre qu’il y avait sur le sol et enlevai les bouts d’herbe sèche dessus. Je soupirai un instant avant de le ranger dans mon petit sac, à peine assez grand pour ranger les affaires de rechanges que j’avais pris par habitude.

M’étirant, je me mis à regarder le ciel. On était déjà en tout début d’après-midi, les nuages blancs dominaient le ciel tandis que mon corps semblait déjà s’habituer à la petite brise qui provenait du lac, quelques kilomètres en amont. Eos se mit devant moi en imitant une expression indigné mais il gagna juste un aller simple dans sa Pokeball, un lieu qu’il chérissait particulièrement.

Me posant à nouveau contre le mur de la maison, je me mis à regretter d’être venu.

Une aventure ?

« Mieux vaut vivre enchaîné près de celui que l'on aime, que libre au milieu des jardins près de celui que l'on hait. »

Quand je tournai ma tête vers Kyle, mon regard fit immédiatement un aller simple vers sa taille, découvrant une serviette qu’il tenait nonchalamment pour couvrir ses parties génitales. Quand il me demanda de rentrer, je ne me fis pas prier. Je suivis ses fesses découvertes, imberbes, qui en laissaient plus que je ne l’aurais voulu. Puis, comme s’il ne réfléchissait pas à la gêne qu’il pouvait m’occasionner, il jeta sa serviette sur le canapé et me proposa un jus de baie. Je fis mine de l’ouvrir mais mon regard se concentra sur sa glotte qui annonça le passage du liquide dans son corps. J’imaginais aisément le chemin qu’il allait parcourir. D’abord l’œsophage, caché derrière un torse fin et musclé, quelques temps plus tard l’estomac, conservé sous une couche de muscles, et enfin… Mon regard se figea sur le bas du corps du jeune homme. Je rougis, puis entendis le bruit de la canette tomber et vis son corps se baisser pour ramasser la canette, prenant une position… Enfin, j’évitais de me faire un dessin, de toutes les manières ce n’était pas comme s’il me draguait avec ça. Et puis, c’était mon meilleur ami.

Je ne peux au final pas décrocher un mot, mon visage est aussi rouge qu’un Ecrapince. Quand Kyle remonte, je peux voir ses bijoux de famille se balancer sans que ça ne le gêne le moins du monde. J’inspire un coup et recommence à respirer normalement lorsqu’il est à l’écart. Ma mère aussi avait cette habitude de se promener à moitié nue dans la maison, et ça me gênait toujours… D’ailleurs, ça me gêne aujourd’hui encore.

Lorsque mon ami redescendit, habillé, mon cœur continua de battre un peu plus fort mais les battements étaient plus espacés que tout à l’heure. Je le voyais toujours nu, même si un jean noir était venu recouvrir le bas de son corps. J'observais son torse nu, aussi imberbe que ses fesses, à l'exception du petit chemin du bonheur qui descendait jusqu'en bas. Pour ma part, je ne portais qu’un tee-shirt d’un vert pomme usé, une veste blanche et un pantalon assez ample, marron. Je vins m’asseoir à ses côtés, essayant de ne pas trop m’approcher, dérangé par quelque chose dans mon pantalon.

« - Tu sais… Je ne suis pas du genre aventurier, même si ça me ferait vraiment plaisir de venir avec toi… Un jour, tu deviendras un grand éleveur, et moi j’espère arriver à percer dans le domaine de la recherche, mais mes recherches demandent à ce que je reste plusieurs jours ou plusieurs semaines au même endroit… Je ne ferai que te ralentir. »

C’était la pure vérité, pourtant je ne pus m’empêcher machinalement de m’allonger sur le canapé en enlevant mes chaussures, dévoilant une paire de chaussettes blanches, ma tête sur les cuisses de Kyle, un peu trop proche de ses parties… Mais ce n’est pas vraiment quelque chose qui me vint à l’esprit sur le moment. Son sourire était toujours digne d’être considéré comme une des plus belles merveilles du monde pour moi.

Je m’étirai légèrement avant de fermer les yeux. C’était si calme. Ça allait vraiment me manquer ce genre d’instants de complicité que nous partagions. Pourtant… Ah, si seulement j’avais le courage de partir loin d’ici, de briser les barrières qui me retenaient. Un son retentit à la porte, m’obligeant à retrouver la vue et à me lever.

« - C’est sûrement le livreur de lait, lançai-je par habitude, sachant qu’il passait à cette heure-là chez Kyle en raison de sa position assez excentrée. J’y vais. »

Le laissant dans le salon, je me dirigeai vers la porte et l’ouvris, découvrant un homme d’une trentaine d’année, les muscles saillants, une tête carrée et une carrure digne d’un maçon. Il souriait, apparemment amusé de me trouver ici. Et moi, j’étais surpris.

« - Si c’est pas le ‘tit Damian, comment ti va loupiot ?

- Ah… Monsieur Raph, veuillez m’excuser mais j’ai très peu de temps à vous consacrer, Kyle part à l’aventure aujourd’hui et j’aimerais…

- Oh, le ‘tit Kyle, y s’est enfin décidé ? J’y croyais plus Didont ! »

Il tendit ses bouteilles de lait, prépayées bien sûr, et s’avança vers l’entrée mais une femme l’interpella, obtenant toute son attention. Il n’hésita pas à aller l’aider à portée les charges de pommes de terre qu’elle ramenait des champs. Je soupirai avant de fermer la porte et de retourner dans le salon, lançant sur un ton amusé :

« - Tu vas manquer à beaucoup de personnes ici… »

Je ne me sentais pas assez courageux pour rajouter : ‘Surtout à moi’.