Déjà la soirée s'annonçait quand Aka et moi débarquons aux plaines. L'horizon est faiblement éclairé par les dernières lueurs oranges et bientôt il fera nuit ici. Heureusement, nous avons quelques heures devant nous. On traverse la plaines sans trop savoir où se situer réellement sur la carte. Si ce n'est que derrière se trouve la forêt. Nous marchons donc jusqu'à trouver un point intéressant et adaptable pour une potentielle nuit sur place. La tente, d'un jet, est installé. Aka et moi commençons notre première quête du bois, brindilles et de feuilles mortes, Aka s'attaque également aux petites roches transportables pour ses frêles petits bras. En moins d'un quart d'heure, nous avons un joli tas de bois et de feuilles, entourés d'un certain nombres de roches à la taille variée. L'allumer n'est jamais une tâche très aisée, malgré le double équipement prévu à cet effet. C'est pour cette même raison qu'un jour ou l'autre, sans doute très proche, nous irons sur l'île de Runya, réputée pour abriter un bon nombre de type feu. Un élément indispensable et pratique à bien des niveaux.

Pour l'heure, je craignais Aka encore trop faible. Il nous fallait un lieu d'entraînement, les combats contre les dresseurs attendront, les arènes me semblent plus loin encore. Pour cette même raison il fallait que l'on constitue une équipe, ce qui fera notre force. Et puis, il me faut une équipe que j'entraînerais. Bien que pour le moment, après deux années d'entraînement, je doute de mes compétences. Mais Aka est un genre tout particulier. Je profite de ce moment, et des réflexions qui surviennent, pour amener Aka afin de le rendre plus fort. Ce dont il est capable, je le sais et cela n'a pas vraiment changé depuis tout ce temps. Peut-être que naturellement, il n'évolue pas spécialement dans la maîtrise des capacités. C'est mon rôle aussi, de lui apprendre des choses. En l’occurrence, une attaque combat qui renforcera sans doute ses assauts offensifs. L'attaque est puissante, mais il a ça dans les gènes. Grâce au pokedex et son écran, Aka peut observer un pokémon qui concentre dans sa main de quoi frapper un grand coup un adversaire. Le tout est dans la concentration avant de relâcher au maximum. Aka s'enthousiasme de cette séance d'entraînement imprévue, la défaite de Wilma lui reste toujours sur la conscience je pense. Je le comprends ! Néanmoins, il est grand temps d'avancer et maintenant, Aka va tenter de casser, briser, voir détruire, des choses qu'il trouvera sur son chemin. Pas grand chose, sur une plaine me direz-vous. Mais il fait ça sur de vieille souche, des cailloux au minimum aussi large que sa main, jusqu'au sol même pour calculer précisément l'angle parfaitement droit du coup porté. C'est tout un travail minutieux que de réussir à comprendre le fonctionnement d'une attaque inconnue. Mais la persévérance paye toujours, pour la peine, je lui met même un vieux bandeau que j'ai trouvé en partant, ça lui va bien, ça lui donne un genre guerrier.

Arborant son bout de tissu qui orne sa petite tête, Aka s’attelle très sérieusement à l'apprentissage de cette attaque, apparemment puissante. Les minutes passent et les heures également pour que finalement la nuit tombe, et Aka s'entraînait toujours aussi frénétiquement. Une détermination sans faille plutôt louable qui lui permet de ne rien lâcher tant que l'objectif n'est pas atteint. Quant à moi, je guette et observe ses tentatives qui se succèdent sans répit. Je l'encourage de mon mieux, mais le plus gros du travail lui revient. Alors pendant ce temps, je prépare la popote parce que je commence à avoir faim. Pour le moment, les rations suffisent encore, mais demain ou après-demain il faudra se réapprovisionner en ville ou comme une barbare. Pendant que je faisais réchauffer cette immonde conserve prise au hasard dans la cave familiale, Aka ne lâche toujours rien, il persiste, avec une certaine hargne encourageante sur le visage.

Je commence à manger, Aka refuse pour le moment, trop occupé à l'entraînement intensif qu'il s'impose. « Allez viens, tu reprendras des forces ! » Que nenni ! Il ne se détourna pas, ignorant mon invitation pourtant nécessaire, et intelligente. Mais il refusa et s'obstina dans sa quête de puissance, comme si ça ne pouvait pas attendre. Alors je l'encourage de plus belle, tout en dévorant sans grand plaisir le contenu de mon bol de plastique. Je me lève finalement pour le rejoindre, l'encourage et observe l'amélioration. Au loin, un son particulier m'interpelle. Comme un lourd galop qui approche furieusement. Le noir ne nous permet pas d'y voir grand chose, mais on décèle facilement dans l'obscurité cette forme imposante qui semble foncer vers nous. Quand les lueurs des étoiles et de la lune me permettent finalement d'identifier la chose, quelques mots s'échappent instantanéneent de mes lèvres. « Oh.. putain de merde ! » Ou comment résumer une situation profondément merdique, et dangereuse.

Réagir et agir vite pour sauver notre peau, surtout. Aka était toujours fasciné par cette attaque qu'il tente encore de maîtriser. Sans le prevenir, sans son avis, je l'enferme dans sa pokéball. Il disparaît alors que le Tauros se fait de plus en plus proche et menaçant. J'en ai lu, des choses sur ces bêtes. Certains en ont même à Wilma et Tarme pour leur robustesse. Ce que je sais, c'est qu'ils sont imprévisibles et violents et ça ne me rassure absolument pas quand je vois l'un de cette espèce me foncer dessus sans hésitation. Le truc à savoir, c'est qu'il charge en ligne droite, donc une fois lancé, difficile à arrêter. Les jambes tremblantes, je reste statique et le voit se rapprocher, encore et encore, jusqu'à n'être qu'à quelques mètres seulement. C'était risqué, mais courir maintenant c'était encore plus bête. Alors, au bon moment, je me jette sur le côté, j'en ai senti le souffle provoqué par la vitesse à son passage. Sans attendre, je rampe jusqu'aux hautes herbes non loin en espérant qu'il n'aura pas compris et s'en ira, défoncer autre chose qu'un être vivant, ou alors tout du moins un autre, mais pas moi.

Et le Tauros s'en est allé. Il ne me repère pas reprend sa course folle vers je ne sais quel obstacle. Ce spécimen est plutôt dangereux, cette plaine manque d'une grande pancarte Attention Tauros déchainé. J'aurais préféré qu'on me prévienne, même si j'aurais dû m'y préparer moi-même. Quoi qu'il en soit, mes heures d'entraînements portent leur fruit, le roulé-boulé c'est devenu automatique. Je fais sortir Aka de sa pokéball, il apparaît un peu contrarié mais je lui explique pour le Tauros furax alors il ne m'en veut pas spécialement. Il reprend son entraînement, tout simplement. Toujours focalisé sur cette attaque, une chose est sûre il veut réellement la maîtriser au millimètre près, à l'identique de la vidé que je lui avais montré. Maintenant, cette maîtrise semble devenu obsessionnelle. Il s'acharne, et tant mieux, mais j'espère qu'il n'est pas trop dur avec lui-même. Le laissant à ses affaires, je retourne m'installer au coin du feu, le cul posé dans la tente enroulée sous le duvet. Mine de rien, le temps se fait très frais.

Aka s'échauffe, encore, encore, et encore. Increvable ! Je tente de le rappeler, mais puisque qu'il a envie d'être sérieux maintenant, il ne daigne pas détourner le regard. Entêté, comme toujours, parce qu'il est complexé, forcément, petit, faiblard, maigrichon. Qu'il soit patient, le changement viendra en temps voulu. Aka est bien trop impatient à l'idée de ressembler aux trio balèzes d'un dresseur du dojo de Wilma, un sacré trio de combattants, qu'Aka admire depuis presque toujours. Du coup, il s'entraîne dur et persiste dans cette voie, je l'arrêterais avant qu'il ne tombe d'épuisement, mais il est tellement borné. Je le laisse faire, l'observe toujours en silence en attendant de voir comment se déroule la suite. La nuit est tombée depuis longtemps, mais j'ai l'impression que le repos, lui, est encore loin.

Toujours partiellement dans la tente, je m'abrite au moins du vent qui se lève et souffle sur la plaine. Un vent frais qui fouette le visage, vraiment désagréable. Aka termine son entraînement, il passe plus de temps à se concentrer qu'à taper cela dit. Vraiment hyper concentré, il me surprend. Je sais bien que le cornèbre est un coup dur, mais va falloir s'en remettre, d'autre adversaire à sa taille finiront par lui tomber dessus et il aura ses chances. Parce que c'est certain, Aka a du potentiel et je dois l'aider à devenir plus fort, évidemment. Seulement, son apprentissage semble long et rien ne pourra se faire du jour au lendemain. Alors il va falloir être patient et c'est gênant, en croyait partir à l'aventure prêt à défier les dresseurs et les arènes. Ce qui veut dire qu'il faudra qu'on bosse plus dur mais aussi qu'on réussisse à constituer une équipe. J'ai pas mal étudié, et le pokédex me facilite les choses lorsque je tombe sur des spécimens qui me serait plus ou moins inconnu. Je devinerais ce que je souhaite et ce qu'il nous faut au fil du temps, même si j'ai déjà l'objectif du pokémon feu qui reste indispensable. Ce sera pour bientôt. En attendant, la plaine et son étendue sombre apparemment infini. De loin, je vois quelque chose remuer qui semble se rapprocher un peu plus. Encore un ? Sérieusement, la plaine n'est pas assez grande faut croire...

Quand la bête se rapproche, je distingue l'air efféminé du Lockpin, un pokémon de concours. Je l'observe et je vois qu'il se rapproche curieusement d'Aka qui ne remarque manifestement pas sa présence. Le pokémon se rapproche et lui tourne autour, Aka s'en aperçoit, mais ne bouge pas. L'intru ne semble pas du type amical, tout du moins n'en a pas la posture d'un Lockpin, moi qui croyait ces choses prudentes, sinon Aka ne les intimide pas ? Le pokémon est certainement trop rapidement pour Aka, bien trop vif et serait capable de l'avoir en deux coup, très certainement. Autant dire qu'après évaluation, la situation n'est pas très bonne. J'improvise, je me lève d'un bond de la tente et y jette la couverture qui me couvrait les jambes. Comme le Lockpin ne semble pas vouloir bouger, je tente un truc qui devrait le pousser à partir, si je me montre suffisamment menaçante pour ce lapin sauteur. J'emporte sans y réfléchir vraiment quelques branches dont l'extrémité est enflammée, de quoi l'effrayer peut-être plus avec du feu capable de lui griller son adorable pompon. Je vais éviter à Aka qu'il ne se prenne une raclée. Je commence donc à courir, puis je hurle tout simplement.. ouais je hurle bêtement pour attirer l'attention du lapin. Qu'il me voit, courant vers lui avec mon feu et mon air pas vraiment commode - c'est sur que j'ai une sacré tête de merde en ce moment. Aka ne comprends pas trop ma tentative, mais moi non plus d'ailleurs, si ce n'est faire jouer la nature en ma faveur.

Faisant pire que mieux, ma vaine tentative fut stoppée par ce foutu lapin. Je reçois une tonne de terre dans la figure, un peu dans la bouche et c'est carrément dégueulasse. Cette saloperie.. j'aimerais mieux la voir disparaître plutôt que d'y confronter Aka. Le Lockpin se dandine joyeusement après avoir ruiné mon assaut, je lâches les brindilles fumantes au sol. J'avoue être frustrée, contrée par un foutu lapin normalement prudent. La nature se dresse apparemment contre moi, on a décidé de me faire chier ce soir. Du coup, je me retrouve face à un pokémon sauvage excité, prêt à en découdre apparemment. Mais Aka est trop faible, c'est évident. Engager un combat est suicidaire, mais mon attaque à moi n'a pas été aussi utile que je l'espérais. Du coup, je me retrouve bloquée dans une situation merdique. Plus gênante encore que lors de la charge frénétique du Tauros, c'était du gâteau à côté.

Je sors la pokéball d'Aka et l'y enferme à nouveau dedans. Je me dis que c'est la meilleure chose à faire pour éviter la cible principale que vise l'autre saloperie aux grandes oreilles. Je me retourne rapidement vers la tente, à hauteur du feu je secoue mes épaules et mes cheveux, d'où tombent une quantité suffisante de terre pour éteindre le petit feu. Le tas encore fumant, je disparais aussitôt, m'engouffrant d'un saut dans la tente, avant de la fermer entièrement. Croire qu'une tente en simple tissu pourrait me protéger d'une attaque, c'est assez con. J'espère surtout qu'il se désintéressera et ira chercher le conflit ailleurs. L'ignorance reste parfois la meilleure des armes, j'aurais déjà du commencer par ça en le voyant approcher. J'ai bêtement cru qu'il fuirait tout simplement, j'avoue j'ai été naïve. Mais en même temps, on me met face à des êtres contre-nature, des êtres agressifs, les plus vilains qui rôdent dans cette plaine. J'emmerde cette bonne étoile qui me gratifie de tant d'emmerdes. Amicalement.